Sandrine Dorbes: Aller à l'essentiel

Quels sont les principaux obstacles à l'efficacité ?  Pourquoi n’allons-nous pas toujours à l’essentiel ?

On pense souvent qu’on n'est pas efficace parce que on est paresseux ou qu’on ne sait pas faire ou qu'il nous manque le bon outil, la bonne application pour faire des choses alors que les obstacles principaux à l'efficacité sont en fait nos habitudes de pensée et nos émotions. C’est une façon de dire que notre cerveau héberge tous les obstacles entre nous et l'efficacité. Dans les exemples que je trouve le plus marquants et qui me parlent le plus, il y a le fait que le cerveau a une puissance de calcul très limitée. Il peut traiter très peu d'informations en même temps et il est incapable de traiter plusieurs tâches à la fois. Quand il en est capable c'est qu’il a appris à le faire mais c'est quelque chose de très fatigant pour lui.

L'autre obstacle qui me parle, c'est le fait qu'on a une durée de concentration très limitée. On a créé des horaires de bureaux comme étant un marqueur optimiste de la productivité, mais si on est honnête avec nous-même on sait très bien que ce n’est pas parce qu'on est au bureau de 9h à 19h qu’on est capable d'être particulièrement efficace ou productif durant toute cette période.

C'est lié au fait que notre cerveau fait ce qu'il veut et qu’il est capable de se concentrer très peu de temps. La durée de concentration moyenne du cerveau est de 2 minutes. Passé ce délai, le cerveau va naturellement aller chercher la distraction ou le repos quand on n'est pas dans un état de flow, c’est-à-dire dans un état qui nous procure beaucoup de plaisir. Quand on prend beaucoup de plaisir à ce qu'on fait, le temps défile et on peut rester concentré, mais quand on est sur quelque chose qui ne nous met pas dans un état de flow, au bout de 2 minutes le cerveau va utiliser le moindre stimulus (le collègue qui passe, la notification, l’email, l'envie de se faire un café…) pour ne pas faire ce qu'il devrait faire.

Le troisième obstacle, ce sont nos biais cognitifs. Notre cerveau a créé des raccourcis pour nous aider à prendre des décisions plus rapidement. Néanmoins ces raccourcis nous jouent parfois des tours car quand on est fatigué, quand on est sous pression ou quand on a peur, on peut prendre des raccourcis qu’on appelle « biais cognitifs » qui vont nous amener à prendre des décisions irrationnelles et illogiques. Pour moi ce sont les 3 obstacles principaux entre nous et l'efficacité.

Souvent les idées viennent quand on est sous la douche, quand on court, qu'on pratique du sport… quelle est l'importance de faire de la place à la réflexion et comment peut-on l’optimiser ?

Dans l'atelier on fait l'analogie entre les idées qui nous permettent d'avancer sur un dossier, d'être créatif et efficace avec l’image d’un papillon. C’est une image que j'aime bien parce qu’un papillon est complètement fugace : on ne peut pas prévoir quand il arrive, anticiper sa trajectoire, on a du mal à l'attraper, on ne peut pas le contrôler. C'est pareil avec les idées. Elles viennent de façon aléatoire, pas parce qu'on l'exige. Cela me ramène aux horaires de bureau. Ça n'est pas parce qu'il est 9h30 que l'idée va venir.

En revanche les idées ont tendance à venir quand on ne s'y attend pas, durant les moments de loisirs ou de repos, quand on a l'impression de ne pas faire grand-chose. Néanmoins ce temps de repos est important à la fois pour notre santé mentale et pour notre santé physique mais aussi parce qu'il permet l'émergence d’idées. Il est nécessaire de prendre du recul pour avoir les idées claires et laisser venir les idées.

Comment réussir à prioriser ? Pourriez-vous nous donner quelques outils ?

J’utilise et recommande une matrice très basique qui s’appelle la Matrice d'Eisenhower. Une fois que j’ai établi ma « to do list », je distingue ce qui est urgent et ce qui est important. L'idée c'est de se dire qu'il y a des choses qui sont importantes et urgentes, ces choses-là doivent être faites sans attendre : c'est l'enfant qui pleure, c’est le bureau qui brûle, une tâche vitale pour la boîte. On doit le faire il n’y a pas de discussion. Le challenge c'est d'être en capacité d'absorber cette charge de travail, donc d'être assez efficace pour absorber ces problèmes quand ils arrivent.

Ensuite viennent les tâches importantes mais non urgentes. C'est dans cette catégorie qu'on va trouver toutes les tâches qui sont importantes pour nous pour atteindre nos objectifs : prendre le temps de se former, prendre le temps de se documenter, prendre le temps de rencontrer des personnes importantes pour nous aiguiller. C'est là-dessus qu'on doit absolument investir du temps.

Tout ce qui est non important mais urgent sont les demandes des autres. Les autres viennent nous solliciter avec leurs demandes. Il faut essayer d'éviter de le faire soit en déléguant, via éventuellement des ressources collaboratives alternatives, soit arriver à les éviter.

Enfin il y a tout ce qui est non urgent et non important. Ce sont les futilités comme passer du temps sur Instagram… Il faut essayer de pas le faire. En revanche prendre un café avec ses collègues, on pourrait mettre ça dans le non important et non urgent, néanmoins ça participe à beaucoup de choses. On en revient à la santé mentale. Mais c'est aussi au café en plaisantant sur ce qu'on a fait ce week-end qu’on peut avoir l'idée ou dire quelque chose qui va nous faire tilter.

Prendre le temps d'aller marcher, prendre le temps d'aller courir, prendre le temps de faire ce qui nous fait plaisir, je mets ces activités dans la catégorie « important et non urgent ». C'est important, ça n’est pas urgent, mais on doit trouver de l'espace pour le faire.

Comment collaborer efficacement ?

On a tendance, quand on vient nous solliciter, à absolument vouloir répondre à la demande de l’autre. On a du mal à dire non. Sans aller jusqu'à dire non, il y a d'autres façons de collaborer avec quelqu'un que de se mettre à travailler sur son dossier. La Harvard Business Review a travaillé sur le sujet et identifié 3 types de ressources.

La première c'est une ressource informationnelle. Ce sont les notes, les procédures, les emails récapitulatifs qu'on a pu écrire qu'on pourrait dans un premier temps envoyer à la personne qui nous fait une demande en lui disant « regarde ça et si tu as des questions viens me voir pour en discuter». C’est une façon de prendre de l'avance sur la discussion pour la rendre plus riche, avec plus de valeur ajoutée.

La deuxième ressource c'est ce qu'on appelle la ressource relationnelle. Quelqu'un va nous faire une demande mais peut-être que nous avons identifié une ressource pour mieux lui répondre. Donc là ce qu'on peut faire plutôt que de prendre le temps de lui répondre, c'est de l'envoyer vers cette bonne personne et la mettre en relation.

La troisième ressource c'est la ressource personnelle. On va passer du temps avec la personne pour répondre à sa question. C'est cette ressource qu'on doit utiliser le moins souvent possible car c'est la plus engageante à la fois dans l'agenda mais aussi émotionnellement. Les études montrent que les femmes ont tendance à davantage se tourner vers ce type de collaboration parce qu’on attend d'elles qu'elles le fassent.

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